Le projet de Reconstruction de l’Université conduit par Henry Bernard se veut global et ne se limite pas aux simples besoins administratifs, d'enseignements ou de la recherche, autrement dit, il ne se réduit pas seulement aux nécessités fonctionnelles d’une université. Ce projet se veut moderne pour l’époque et se traduit en partie par une mise en scène de l’institution universitaire incluant notamment un projet artistique qui pousse le détail jusqu’aux aménagements intérieurs. Ainsi, Jacques Quinet (1918-1992), ébéniste et décorateur, se voit confier la mission d’ameublement d’espaces emblématiques de la faculté de Caen, un projet assez méconnu tant dans la carrière de J. Quinet que pour ce qu’il en reste encore aujourd’hui. Par ailleurs, la raison précise de l’appel à Jacques Quinet est difficile à justifier en raison d’un manque d’archives et de documentation de première main. Il est toutefois élève de l’artiste Yvonne Guégan, proche de sa famille et professeur de dessin à Caen, ce qui peut laisser croire que ce choix à pu être fait en partie grâce à l’influence de l’artiste. Devenu grand décorateur dans les années 1940, Jacques Quinet est considéré comme un “tenant du bon métier et du beau meuble d’ébéniste, mais d’un goût moderne”, ce qui correspond parfaitement à l’esprit de modernité que souhaite rendre le projet de Reconstruction.   

Jacques Quinet fait donc partie des divers artistes qui ont participé à la Reconstruction de l’université et est intervenu sur l’ameublement d’au moins trois espaces symboliques dont deux intègrent le périmètre classé, la salle de lecture de la bibliothèque et le bureau du “Doyen” ; le troisième espace correspond au bureau du Recteur (aujourd’hui bureau du Président). Par ailleurs, son travail complète le premier style de mobilier dessiné par Henry Bernard présenté en juillet 1954. Jacques Quinet crée ainsi un mobilier moderne dédié à l’activité intellectuelle; il doit notamment répondre à l’efficacité de recherche, à la sociabilité universitaire ou encore au travail administratif. Pour ce faire, J. Quinet et son équipe s'appuient sur différents aspects comme les fondamentaux de la couleur et du matériau mais prend aussi en compte la lumière afin que les pièces se distinguent clairement  dans les différents espaces de la bibliothèque et de la faculté de droit-lettres. La clarté est privilégiée pour les grands espaces étudiants comme la salle de lecture. 

Concernant les meubles d’assise, les plans de Quinet offrent quelques variantes allant d’un modèle de chaise à celui de chauffeuse. Parmi eux, un modèle de siège se détache par son originalité, un tabouret aux lignes originales est proposé pour des usages plus temporaires.

Marqué par une forme presque japonisante, il ne possède pas d’équivalent dans les autres plans proposés par Jacques Quinet mais se rapproche, par son piètement et sa structure, aux tables du même espace, proposant ainsi une harmonisation cohérente et visuelle (ces deux pièces design sont visibles dans le parcours de l’exposition L'Université de Caen reconstruite : architecte, artistes et designers que propose la promotion de Master 2 « Métiers du patrimoine). 

Les plans sont dessinés pour la plupart entre janvier et février 1957, par Pierre Chrétien, chef d’atelier depuis 1952, l’objectif étant de pouvoir présenter les espaces aménagés pour les cérémonies officielles du 1er juin 1957. On y retrouve une utilisation large des matériaux plastiques comme le formica ou le sanglar, qui ont la particularité d’être résistants pour des usages réguliers et de pouvoir être colorés.